LE KARATE AU SERVICE DU TRAUMA

La Maison Dorcas vient d’intégrer dans son schéma de prise en charge, le programme de karaté et de football afin de redonner aux femmes la confiance et l’estime de soi.
Dès sa mise en place, ce programme est accompagné par l’association –« Fight For Dignity » de la célèbre Laurence Fischer. Durant son séjour à Panzi (du 3 au 7 mai 2019), la championne du karaté français s’est dite fière d’assister les femmes victimes des violences sexuelles aux côtés du professeur Denis Mukwege.
En effet, le sport a une dimension thérapeutique significative pour la reconstitution tant physique que psychologique des survivantes des violences. Depuis l’année 2014, Laurence Fischer a pris l’initiative de mettre son expérience dans le domaine des arts martiaux, au service des femmes congolaises et particulièrement les victimes des violences sexuelles.
« Je me suis dit, étant championne de karaté, comment puis-je emmener le football et le karaté à contribuer à l’épanouissement physique et psychologique des victimes de violences sexuelles ? », a révélé madame Fischer.
Ceci étant, Laurence a pris l’initiative de se joindre à la lutte du Dr Denis Mukwege en intégrant au sein de la maison Dorcas une nouvelle approche thérapeutique consistant à accompagner les femmes survivantes des violences sexuelles par une pratique accessible et adaptée du sport pour leur permettre de réadapter leur mental à leur corps.

Trois fois championne du monde de Karaté, Laurence Fischer ne s’est jamais sentie aussi heureuse en travaillant avec les survivantes des violences sexuelles. Ce moment passé avec cette catégorie de femmes dépasse de loin la joie qu’elle a éprouvé le jour où elle avait arraché les trois couronnes mondiales et remporté six trophées européens qui ornent sa vitrine.
«C’est vrai que j’ai été championne du monde de karaté mais ma plus grande fierté c’est de pouvoir transmettre cette connaissance aux femmes du Congo. […] C’est une connaissance à laquelle souvent elles n’ont pas accès. Le fait qu’elles le fassent, et qu’en plus elles le font très [très] bien, c’est une très grande fierté aussi parce qu’elles ont connu des moments difficiles où elles ont perdu aussi l’estime d’elles-mêmes ».
Par ailleurs cette star du tatami a apprécié l’ambiance et l’engouement qui ont animé les femmes lors de leur travail. Cette ambiance traduit, selon Laurence Fischer, leur force et leur capacité à être à nouveau « des femmes confiantes qui ont espoir et qui sont à nouveau pleines de volonté et d’envie de manger la vie… »
« C’est la joie de travailler ensemble, d’apprendre de son corps, de se sentir mieux et de se sentir plus forte. Quand elles font le karaté, elles ont la joie et elles se sentent encore plus fortes […]. C’est le meilleur des moyens pour qu’à nouveau elles soient elles-mêmes et qu’elles existent dans leur société et qu’on ne les juge pas parce que, malgré les difficultés, elles sont des femmes fortes ».
Le karaté combine à la fois les facultés physiques et psychologiques de la personne, deux dimensions constitutives des quatre piliers de prise en charge holistique selon le modèle de Panzi.

Ainsi, le Karaté pratiqué au sein de la maison de la Maison Dorcas est différent du Karaté ordinaire. Il a une visée triaxiale orientée vers un angle psychologique, social et physique.
Sur le plan psychologique, le Karaté selon l’aperçu Fight For Dignity a pour objectif de déboucher sur une décharge émotionnelle, et de rancune et cela grâce aux exercices de respiration et à l’expression qu’il implique.
Au regard de leur passé, les survivantes des violences sexuelles, en pratiquant le karaté, elles développent une confiance en soi et l’estime de soi, à travers le respect de l’autre. Sur le plan thérapeutique, la pratique du karaté à la Maison Dorcas a pour objectif de décontracter les muscles du périnée.
Selon cette approche, contrairement aux clubs de karaté ordinaire, les hostilités ne sont pas au rendez-vous. Ici, le challenger est perçu comme un partenaire, et non comme un adversaire, chacune a besoin de son vis-à-vis pour progresser et aucun trophée n’est mis en compétition.