Projet UE- mines

Réinsertion socio-économique des enfants et des professionnelles de sexe vivant autour des mines artisanales dans le territoire de Mwenga, province du Sud-Kivu, Est de la République démocratique du Congo.

I. CONTEXTE

Ce programme est de 3ans allant de juin 2016 à mai 2019 mais il a été fusionné, grâce à un avenant signé en novembre dernier au programme d’appui holistique jusque Janvier 2022. Depuis Juin 2016, sous le leadership de la Fondation Panzi, les ONG CREMETRAL à Kamituga ,APEF à Luhwindja et BEATIL/ALT, avec l’appui de l’Union Européenne, luttent contre la présence des enfants et des femmes dans les carrés miniers où les revenus de cette population dépend des activités minières non règlementées dans lesquelles les enfants et les femmes y sont malheureusement impliqués avec comme conséquences le faible taux de fréquentation scolaire et la prostitution des femmes et des filles ainsi que des adolescents. /p>

Travail dans les mines (Kamituga)

Travail dans les mines (Kamituga)

Les activités principales telles que, la prise en charge médicale, psychosociale ,de réinsertion socioéconomique et juridique/judiciaire des bénéficiaires sont menées conformément aux objectifs du projet qui sont notamment d’augmenter la fréquentation scolaire des enfants travaillant dans les mines à travers une formation scolaire de récupération , de réduire le nombre des adolescents et des travailleurs du sexe travaillant dans les mines, grâce à des actions de formation professionnelle , de conscientiser les parties prenantes, les acteurs locaux et les membres de la communauté sur la protection de l’enfance, les droits de l’homme, les avantages différés de l’enseignement scolaire, et la santé sexuelle.

II. PRINCIPAUX RESULTATS

- Prise en charge médicale

Les contrats de collaboration sont signés avec les Bureaux centraux des zones de santé de Mwana et de Kamituga pour que les deux hôpitaux généraux de référence de deux zones de santé précitées et les centres de santé ciblés assurent la prise en charge médicale des bénéficiaires notamment les enfants des centres de récupération (CRS) et leurs parents, les professionnelles de sexe, les adolescents ainsi que leurs dépendants.
Au cours de cette année 2018, près de 1000 bénéficiaires ont été pris en charge dans les structures sanitaires concernées pour diverses pathologies telles que le paludisme, les gastroentérites, les infections sexuellement transmissibles etc. En plus,20 professionnelles de sexe et adolescentes ont adhéré aux méthodes de planification familiale dont 5 à Luhwindja et 15 à Kamituga. Celles qui ont adhéré utilisent couramment le préservatif, la méthode du calendrier, la méthode d’allaitement maternel, la pilule, le depo provera, le Dispositif intra utérin (DIU)…mais d’adhésion reste faible dans les deux zones de santé d’où une forte sensibilisation à envisager à travers des émissions radiodiffusées et des réunions des groupes spécifiques ciblés.
Les principaux défis dans cette prise en charge médicale sont notamment le nombre élevé de dépendants (parents des enfants scolarisés, membres des familles des adolescents et des professionnelles de sexe) sollicitant les soins, la mobilité des prestataires amenant l’équipe de la Fondation Panzi à organiser chaque fois des sessions formation ou de remise à niveaux. Mais aussi, il y a des cas compliqués qui arrivent à l’hôpital et nécessitent un transfert vers des structures plus spécialisées mais des fonds alloués à cette activité posent problème.

- Prise en charge psychosociale

Elle est assurée par des Psychologues et des agents psychosociaux recrutés pour cette fin. Plusieurs techniques thérapeutiques sont utilisées pour amener les bénéficiaires à récupérer leur santé mentale.
Au total, 729 écoutes individuelles et 22 écoutes collectives ont été réalisées dans les deux sites du projet dont 376 à Kamituga et 353 à Luhwindja auprès des enfants scolarisés dans les deux Centres de Récupération Scolaire (CRS),leurs parents, les professionnelles de sexe, les adolescents et d’autres membres de la communauté qui expriment les besoins.
A part les écoutes, les jeux thérapeutiques et des sorties récréatives sont organisés pour les enfants des Centres de Récupération Scolaire.
525 visites (101 à Kamituga et 424 à Luhwindja ) à domicile ont été effectuées dans les familles des enfants des CRS dans le cadre de suivi des cas des enfants malades, de sensibilisation des parents sur l’hygiène, l’absentéisme, le retard, la gestion des enfants pendant les vacances et d’autres divers entretiens avec les familles…ainsi que des enfants ayant terminé dans les Centres de Récupération Scolaires (CRS) et déjà admis au secondaire.

Cellule de communication de la Fondation Panzi :entretien(dans le cadre du suivi) avec un ancien élève du CRS actuellement au secondaire (Institut Ushirika de Luhwindja).

Les principaux défis sont le nombre réduit des assistants psychosociaux, une faible fréquence de séances de leur formation et une faible intégration de la santé mentale dans les soins de santé primaires dans la Province sanitaire du Sud-Kivu en général et de Kamituga et Luhwindja en particulier.

Réinsertion socioéconomique

Grace à l’appui de l’Union Européenne, les infrastructures de scolarisation des enfants et de formations des professionnelles de sexe et adolescents en métiers ont été construites/réhabilitées.

CRS avant réhabilitation
Luhwindja
CRS après réhabilitation
Luhwindja
Centre de formation en métiers
Centre de formation en métiers construit pour les adolescens ( Luhwindja )

1. La scolarisation des enfants

Elle se fait dans deux centres de récupération scolaires à Kamituga et Luhwindja où les enfants sont regroupés en trois niveaux correspondant respectivement au niveau I :enfants de première et de deuxième année; niveau II :enfants de troisième et quatrième année et niveau III :enfants de cinquième et sixième année.
Sur 442 élèves présents (3 niveaux) dans les deux CRS en Janvier 2018, 426 élèves dont 178 à Luhwindja et 248 à Kamituga ont poursuivi normalement les cours dans les deux Centres de Récupération Scolaire.

Enfants dans le carré minier « calvaire »
Enfants de CRS en classe (Luhwindja)

Les enfants reçoivent des kits à la rentrée scolaire et une alimentation à l’école chaque jour.
La proclamation des résultats du Test National de Fin d’Année (TENAFEP) de l’ édition 2017- 2018 a donné une réussite de 100%.
Les enfants ayant fini dans les centres de récupération scolaire et déjà admis au secondaire sont régulièrement visités par les staffs des Organisations de mise en œuvre (APEF et CREMETRAL),technique (BEATIL) , de la Fondation Panzi et de la Délégation de l’Union Européenne (DUE).

Des réunions des responsables des écoles avec les parents ont été tenues pour expliquer à ces derniers l’intérêt de s’approprier les Centres de Récupérations Scolaire et travailler dur pour le maintien de leurs Activités Génératrices de Revenu (AGR) qui contribueront plus tard à la scolarisation de leurs enfants une fois au secondaire. .
Il faut signaler que les élèves ont poursuivi normalement les cours mais un taux d’abandon très faible a été constaté ne dépassant pas 1%.
D’autres activités para et périscolaires ont été organisées notamment la participation des enfants à l’entretien des jardins potagers dans les enceintes de leurs CRS qui ont produit des légumes dont une partie a été qui ont été vendue et une autre consommée par les enfants , des visites guidées, des matchs intra et interscolaires, des défilés lors de la clôture de la célébration de la journée du 11 octobre dédiée à la jeune fille et de la campagne de 16 jours d’activisme etc.
Une visite de la délégation de l’Union Européenne, du partenaire technique BEATIL/ALT, du partenaire de mise en œuvre de Luhwindja APEF et du staff CREMETRAL a eu lieu à Kamituga le 09 octobre 2018.

La Délégation de l’Union Européenne

En 2018, APEF a distribué 27 lapins aux enfants du niveau III(finalistes) et 320 cobayes pour les enfants de différents niveaux. A ce jour, 35 lapins sont disponibles et nourris par les enfants dans leur clapier scolaire et 742 cobayes sont entretenus par les enfants à leurs domiciles respectifs.
Il a été noté une implication réelle des autorités Etatiques (Sous-Proved de l’inspection provinciale de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel (EPSP) Mwenga I) à travers des visites professionnelles et techniques du CRS de Kamituga .
Des émissions sont animées à travers les chaines locales pour la sensibilisation de toute la communauté sur plusieurs thématiques liées à la scolarisation des enfants.
Un magasine a été réalisé par l’expert en éducation en collaboration avec les Directeurs et élèves des CRS de Luhwindja et de Kamituga avec deux radios communautaires locales (journalistes de RDLU : Radio communautaire de Luhwindja et de la radio vision Shala.
Le principal défi reste la présence élevée des enfants dans les mines, soucieux de fréquenter aussi les centres de récupération scolaire mais les moyens sont limités.

2. Les activités génératrices de revenu (AGR) et les mutuelles de solidarité (MUSO)

Ces activités ont grandement contribué à la réduction du nombre des adolescents et des professionnelles de sexe dans les mines, grâce à des actions de formation professionnelle et de réinsertion socioéconomique à travers les métiers tels que la coupe couture, la mécanique, la vannerie, l’art culinaire etc.

Kamituga
Visite d’un atelier de soudure et ajustage (Kamituga) Atelier de mécanique par la Délégation de l’Union Européenne (DUE)
Atelier de mécanique

Au total 430 bénéficiaires dont 243 Professionnelles de sexe et 187 adolescents ont reçu une formation en AGR et les ont mises en place.Ils sont constitués en mutuelles de solidarité.
Les parents des enfants qui étudient dans les centres de récupération scolaire ont aussi reçu des subventions sous forme de cash et font aussi partie de ces mutuelles de solidarité.
Quant aux mutuelles de solidarité (MUSO) ,32 sont opérationnelles comptant 584 membres composés des bénéficiaires directes et des membres de la communauté. La caisse des MUSO est de 8.506.150 Francs Congolais (5.316,3$) répartis en 7.982.230 Frans Congolais(4.988,8$) dans la caisse verte et 523.920 Francs Congolais(327,4$) dans la caisse rouge.

Sensibilisation des parents (d’ enfants de CRS )membres des MUSO sur le remboursement des crédits (Luhwindja)
Sensibilisation des parent

Le principal défi est l’absence des statistiques renseignant sur la rentabilité économique et financière de ces petites entreprises naissantes en milieu rural mais une étude de rentabilité pourra corriger ce défi.
Accompagnement Juridique et judiciaire
Les capacités des para juristes de Kamituga et Luhwindja ont été renforcées par un avocat de la clinique juridique de la Fondation Panzi sur la prise en charge juridique et judicaire des victimes des violences sexuelles et celles basées sur le genre .
Une assistance juridique a été apportée à 64 personnes dont 75% se sont clôturés par une médiation réussie. Il s’agissait notamment des conflits fonciers, des enfants accusés de sorcellerie, des coups et blessures, des vols simples, de mariage précoce et forcé, d’abandon/délaissement des enfants…
Sur le plan judiciaire, 2 dossiers de viol sur mineures (élèves du Centre de Récupération Scolaire de Luhwindja) ont été soutenus par la clinique juridique de la Fondation Panzi au tribunal de grande instance de Bukavu jusqu’à la condamnation de l’auteur pour 10 ans de prison avec une amende de 2000$.
L’équipe de CREMETRAL a assuré une forte sensibilisation de la population sur la poursuite des présumés auteurs des violences sexuelles à Kamituga.13 dossiers ont été accompagnés auprès du Tribunal de Grande Instance (TGI) de Kamituga par les avocats de la clinique juridique de la Fondation Panzi aboutissant à 9 condamnations lors d’une mini chambre foraine organisée à Kamituga du 15 au 25 octobre 2018.
Le défi majeur dans cette assistance est la lenteur des juridictions dans le traitement des dossiers des violences sexuelles et l’absence d’indemnisation des victimes.
Pour atteindre les résultats escomptés, une implication des parties prenantes et d’autres leaders locaux est indispensable :

Conscientisation des parties prenantes, des acteurs locaux et les membres de la communauté.
Pour assurer une bonne conscientisation de différentes parties prenantes et d’autres leaders locaux, des émissions passent en direct ou en différé sur les chaines des radios communautaires locales mais aussi des séances d’animation individuelle, de groupe et de masse sont organisées en milieu scolaire, dans les carrés miniers, lors de la célébration de la Journée Internationale de la Femme (JIF 2018) et dans la communauté.
Au cours de l’année 2018, 124 émissions ont été radiodiffusées à Kamituga et à Luhwindja sur la protection de l’enfant (les droits des enfants, la lutte contre les violences sexuelles et celles basées sur le genre, la gestion des enfants pendant les vacances pour qu’ils ne retournent pas dans les carrés miniers, la préparation de la rentrée scolaire etc).2855 élèves ont pu être sensibilisés sur leurs droits.
A l’issue de ces séances de sensibilisation, 175 enfants de Kamituga ont été inscrits à l’Etat civil. Plus de 3000 personnes ont été sensibilisées sur la prévention des infections sexuellement transmissibles (IST) , les méthodes de planification familiale, les grossesses précoce ainsi que les droits de l’enfants et de la femme) .

Des séances de sensibilisation en petits groupes et en masse avec les autorités locales, des responsables des services Etatiques (Police, Armée, Genre, Enseignement Primaire et Secondaire…) et d’autres couches de la population sont tenues.

Sensibilisation des jeunes sur les SBBV(Kamituga)
Leaders locaux en carrefour (Kamituga)

Il y a eu redynamisation de 18 clubs d’enfants dans les écoles primaires et secondaires dont 8 à Kamituga et 10 à Luhwindja sur les questions relatives à leurs droits.

Coordination des activités
Les activités menées dans le cadre du projet sont coordonnées par la Fondation Panzi qui assure le lead du consortium. Une réunion de coordination est tenue une fois le trimestre et c’est dans tous les sites de manière rotative selon les axes Kamituga-Luhwindja et Bukavu.
Au cours de ces assises, plusieurs sujets/thématiques sont abordé(e)s notamment l’état d’avancement des activités au cours du trimestre, l’évolution des indicateurs, les histoires de succès, les principaux défis et les voies d’amélioration.

III. HISTOIRES DE SUCCES

Moi DIANE MULONDA KABUNGULU membre du restaurant MUNGU NI JIBU : « suis trop fière pour la subvention reçue de la Fondation Panzi et CREMETRAL, aujourd’hui j’ai mon activité individuelle en plus du restaurant, un kiosque à la maison où je vends quelques casiers de sucrés, jus, sardines, etc. J’ai retrouvé mon honneur, ma dignité et ma valeur et suis capable de payer les frais scolaires de mes enfants ».

VIVIANE, une Professionnelle de sexe de Karhundu (Luhwindja), du restaurant HAKUNA UBAGUZI, déclare ce qui suit : « j’arrive à scolariser maintenant mon enfant seule à l’école secondaire. Quand j’ai commencé mon activité de restaurant, je ne pensais pas pouvoir y arriver. Au début je n’avais pas suffisamment des clients. J’ai amélioré la recette et j’ai commencé à trouver des clients. L’argent gagné m’a permis d’amener mon enfant dans une école secondaire de la place proche de la maison. Avant il étudiait loin mais je ne pouvais pas le changer parce que là on payait moins cher. Ce qui me rend fière aujourd’hui en tant que parent, c’est le fait que l’argent alloué aux frais scolaires vient de ma poche. Je ne suis plus obligée de coucher avec les hommes pour faire étudier mes enfants. Mes enfants réussissent également en dignité ».Merci APEF et Dr Mukwege.

IV. IMPACT
  • Les enfants inscrits dans les Centres de Récupération Scolaire (CRS), les professionnelles de sexe et les adolescents admis au programme ont abandonné les mines au profit de la scolarisation et des ateliers de travail et cela a changé les conditions de vie des bénéficiaires chez les enfants sur le plan hygiénique et Chez les professionnelles de sexe et adolescents, on note une acquisition de nouvelles connaissances sur différentes thématiques( droits des enfants, santé de reproduction) et métiers divers (coupe couture, mécanique, soudure et ajustage, menuiserie…) et une amélioration substantielle du pouvoir économique des bénéficiaires se traduisant par quelques signes de progrès dans les ménages (alimentation, scolarisation, soins de santé, habitat, habillement…).
  • Une reconstruction de leur estime de soi à travers une stabilisation de leur santé mentale qui était déjà perturbée par des évènements traumatiques vécus dans les carrés miniers.
  • Une cohésion sociale s’observe grâce aux rencontres des bénéficiaires lors de différentes formations, des réunions des mutuelles de solidarité, des visites collectives des ménages lors des évènements heureux et malheureux survenus chez un/une membre.